Bacchus
maquette du décor du 1er tableau de l'acte III pour la création de Bacchus par Amable
Opéra en quatre actes et sept tableaux, livret de Catulle MENDÈS, musique de Jules MASSENET (1908).
manuscrit autographe de la partition
Création au Théâtre de l'Opéra (Palais Garnier), le 05 mai 1909 ; mise en scène de Paul Stuart ; décors d'Amable et Henri Cioccari (1er acte [Aux Enfers] et 1er tableau du 3e acte [une Terrasse du palais des Sakias]), Rochette et Landrin (2e acte [Au Népal – Après la bataille] et 4e acte [Au palais des Sakias – le Bûcher d'Ariane]), Georges Mouveau et Demoget (2e tableau du 3e acte [la Forêt]) ; costumes de Joseph Pinchon ; chorégraphie de Léo Staats.
Répétition générale le 02 mai. 2e représentation le 07 mai ; 3e le 10 mai ; 4e le 15 mai. 5e représentation le 19 mai 1909, avec les créateurs.
5 représentations à l’Opéra au 31.12.1961.
personnages |
emplois |
Opéra 02 mai 1909 (création) |
Ariane | soprano dramatique | Mlles Lucienne BRÉVAL |
la Reine Amahelli | contralto | Lucy ARBELL |
Kéléyi | soprano | Mme Antoinette LAUTE-BRUN |
Bacchus | ténor | MM. Lucien MURATORE |
le Révérend | basse | André GRESSE |
Silène | baryton | Marcellin DUCLOS |
Mahouda | baryton | Pierre Etienne TRIADOU |
Pourna | ténor | Louis NANSEN |
Ananda | baryton | Joachim CERDAN |
Trois Moines | DELMONT, EZANNO, Armand-Emile NARÇON | |
Manthara | rôle mimé | Mlles Blanche KERVAL |
Clotho, la Parque | déclamation | Lucie BRILLE |
Perséphone | déclamation | Renée PARNY |
Antéros | déclamation | MM. Edouard de MAX |
Chef d'orchestre | Henri RABAUD |
Chœurs : les Compagnes de Perséphone ; les Nonnes (coryphée-soprano : une Prêtresse) ; Moines ; Guerriers ; Prêtres ; Bassarides ; Silènes ; Faunes ; Bacchantes, etc. ; Voix des âmes ; Voix du ciel.
Figuration : Guerriers, le Cortège de Bacchus, Prêtres, Moines, etc.
Danses :
Acte I
Spectres de Roses.
Acte II
Pyrrhique, Bassarides, Bacchantes, Lydiennes, Faunes et Satyres.
Muses : Mlles BERTHON, LEFÈVRE, BACKER.
Adolescents, Jeunes Vierges Grecques, Cyclopes.
Acte III
« les Mystères dionysiaques », ballet.
Mlles ZAMBELLI (la Bacchante), Léa PIRON (Jeune Hindou), SIRÈDE (la Vigne), G. COUAT (1re Chasseresse), BARBIER (1re Bacchante), MEUNIER et BILLON (1res Hindoues), DELSAUX (la Victime), MM. Léo STAATS (le Bacchus), Charles JAVON (Silène), Jules JAVON (Hybris, fils de l'Ivresse).
Chasseresses, Bacchantes, Hindoues : Mlles JOHNSSON, URBAN, L. COUAT, DE MORCIRA, H. LAUGIER, COCHIN, SCHWARZ, B. MARIE, DOCKÈS, GUILLEMIN, BRÉMONT, MOURET.
Bacchants : MM. CLÉRET, A. AVELINE, G. RICAUX, MILHET.
Apsaras, Jeunes Grecques, Jeunes Hindoues, Prêtresses, Faunes, Satyres, Ægipaus, Panisques, Elèves-Enfants.
costume de Joseph Pinchon pour la création
autres costumes de Joseph Pinchon pour Bacchus
casque de la reine Amahelli lors de la création d'après une maquette de Joseph Pinchon
Lucy Arbell (la Reine Amahelli) lors de la création
Lucien Muratore (Bacchus) lors de la création
André Gresse (le Révérend) lors de la création
Renée Parny (Perséphone) lors de la création
Marcellin Duclos (Silène) lors de la création
Jeunes bacchantes du ballet de Bacchus lors de la création (photo Auguste Bert)
Le sujet de cet ouvrage est une sorte de suite à Ariane, pièce représentée sur la même scène (1906). Le poème de Catulle Mendès repose sur une des nombreuses légendes de la Grèce ancienne. Ariane est délaissée dans l'île de Naxos par Thésée, avant qu'il ne pénètre dans Athènes. Une double version nous instruit du sort d'Ariane : l'une est que, de désespoir, la fille de Minos se jeta à la mer ; l'autre nous dit qu'elle fut recueillie par Dionysos, connu aussi sous le nom de Bacchus, qui, prenant la figure de l'infidèle Thésée, emmena Ariane avec lui à la conquête des Indes pour opposer à la religion bouddhique du renoncement et du néant les mystères dionysiaques de la vigne, de l'amour et de la joie. C'est cette version que, dans leur premier acte ou prologue, les auteurs nous exposent par les voix de Perséphone, la reine de l'empire des ombres, de la parque Clotho et du dieu Antéros, personnages dont la déclamation est soutenue par une partie symphonique. Au second acte, l'armée conquérante de Bacchus a atterri aux Indes, dans le Népâl, pays des Sakias. Le cortège orgiaque et tumultueux des satyres et ménades effraye les prêtres bouddhistes et la guerre éclate entre les envahisseurs, dont le Maître proclame la joie de la vie, le triomphe de l'amour, et les disciples de l'austère doctrine du nirvâna. Amahelli, reine des Indes, fuit devant Bacchus. Mais le révérend Ramavaçou, chef de la communauté bouddhique, invoque le secours des rôdeurs des bois, de « l'affreux peuple poilu des hurleurs aux bras forts ». Les grands singes répondent à son appel : ils précipitent des rochers et lancent des haches de pierre sur l'armée ennemie. Après un interlude symphonique décrivant l'étrange bataille, nous voyons Bacchus et Ariane vaincus, gisant à terre, gravement blessés. La reine Amahelli les fait prisonniers ; mais, à la vue de Bacchus, elle demeure en extase devant sa beauté et elle ordonne qu'on épargne sa vie. Au troisième acte, Amahelli ne peut résister davantage à l'amour qu'elle éprouve pour le jeune dieu enchanteur ; elle s'incline devant lui en se proclamant « sa royale servante ». Pour obtenir Bacchus, elle consent à tout et va même jusqu'à accueillir Ariane, que son nouveau maître lui impose en partage. Mais ce n'est pas sans fourberie que la reine accepte cette rivalité. Un jugement des prêtres hindous condamne Bacchus à être brûlé vif, à moins qu'une femme ne fasse pour lui le sacrifice de sa vie. Amahelli convainc la douce Ariane qu'elle doit être la victime expiatoire qui sauvera le héros. Ariane accepte et se laisse conduire au bûcher ; mais, avec un poignard que lui glisse une prêtresse, elle se frappe avant d'être atteinte par les flammes. Bacchus arrive trop tard pour la sauver ; il supplie Zeus son père d'être « juste envers la morte et la vivante » et la reine Amahelli tombe foudroyée, tandis qu'Ariane, transfigurée, est emportée dans l'apothéose radieuse des étoiles. Le livret de Catulle Mendès est plein d'obscurités et d'ambiguïtés ; il manque d'action et il est empreint d'une philosophie métaphysique cachant des symboles assez difficiles à démêler. Le prologue est une transplantation de celui du Crépuscule des Dieux, où les normes interrogent le Destin, et où le fil qui se brise montre la destinée qui va accabler les héros du drame. On devine quelles difficultés le compositeur a dû éprouver en écrivant une partition sur ce poème abstrus. Il a tenté d'y échapper en recourant à l'artifice bien connu des mélodramaturges par l'emploi, dans tout le prologue, d'un simple accompagnement qui souligne le récit déclamé des acteurs. Moins heureux que dans Werther, Manon ou même le Jongleur de Notre-Dame, Massenet ne semble pas avoir retrouvé dans ce nouvel ouvrage sa coutumière inspiration si personnelle et d'un charme si irrésistible. Quelques pages sont toutefois à signaler : « Zeus immortel », en mi mineur, puis « Ne me faites pas de grâce », en si mineur, très expressive, ainsi que la chanson de Kéléyi. L'interlude orchestral, qui dépeint la bataille des singes, est assez bien venu. (Stan Golestan, Larousse mensuel illustré, juillet 1909)
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